Articles récents
SISYPHE ET LE BOUSIER
SISYPHE ET LE BOUSIER
Sisyphe, personnage de la mythologie grecque condamné (pour avoir défié les dieux) à remonter une pierre dégringolant sans fin du sommet de la colline, symbolise le tragique de la condition humaine à travers la répétition douloureuse sans fin des mêmes gestes, qu'il arrive à surpasser et à s'en libérer par la force de sa conscience. Mythe repris par Albert Camus qui défend que la conscience est libératrice de la condition humaine.
Le bousier, est un scarabée qui se nourrit d'excréments qu'il roule en boule et pousse derrière lui.
Sisyphe avant d’être condamné était dans la lumière, fils de roi, parmi les riches et les notables. Il n'avait pas l'humilité, l'insignifiance et la noirceur du Bousier. Sisyphe en remontant sa pierre a une activité certes pénible et humiliante, mais aussi vaine et inutile. Le Bousier en nettoyant les déchets fécaux est utile aux autres, ne demande rien, travaille gratuitement sans relâche, ignoré.
Le poème si dessous est à contre éclairage, faisant l'ombre sur Sisyphe, éclairant et réhabilitant le Bousier, obscur et insignifiant personnage, émouvant par sa vaillance et son obstination. Un salut à tous les humbles, les laborieux infinis et indispensables de ce monde.
Le sens du mythe à évolué depuis l'antiquité grecque à nos jours, mais il ne faut pas chercher bien loin dans nos sociétés modernes pour trouver des bousiers humains, sacrifiés aux basses taches, réifiés, humiliés, exploités et exclus.
______________________________________________________________________
/image%2F2772808%2F20210413%2Fob_584e94_20150620-remontant-la-butte1.jpg)
Poème :
SISYPHE ET LE BOUSIER
Sur les monts de l’Olympe, nous vîmes un jour Sisyphe
Fils du roi de Corinthe, poussant par devant soi
La roche immense, châtiment des dieux…
Cent fois sur le rocher remettant son ouvrage
Montant et remontant la pierre de la basse campagne
Aux sommets escarpés de la dure montagne.
Mais quelle faute immense avait commis Sisyphe
S’ahanant tel un maudit parmi les trépassés
Transpirant nuit et jour, sans calme et ni repos
Sans pause ni plaisirs poussant maudite pierre
Pierre brute ou polie, cubique ou arrondie
Lui aussi était t’il un mauvais compagnon
Un Abibal tueur du club des haschischins
Payant ainsi sans fin de son récurrent supplice
Le meurtre rituel du divin architecte
Quelle faute sans fin expiait cet esclave
Face aux dieux courroucés de l’imposant Olympe !!!
Ce sont travaux forcés à perpétuité,
Sisyphe, patron des bagnards, des Spartacus
Symbole des damnés à la répétition,
Des condamnés sans fin à tourner en rond,
Des fous circulaires jamais absous toujours coupables
Des manants enchainés aux taches subalternes,
Travaux répétitifs et taches récurrentes.
Mais voila qu’en face de ce très beau symbole
De l’humaine condition et de son esclavage,
Le scarabée bousier comme un voleur de feu
Tente de lui ravir la palme des honneurs.
Car loin de Sisyphe et de son vertical effort
Notre pauvre bousier, scarabée coprophage ,
Au lieu de pousser haut les produits intestins
Choisit de les rouler en poussant par derrière
Au mépris de l’effort vers les plus hautes cimes
Et préfère rouler ses boules en parfait copronyme !!
Oh ne méprisez point cet insecte noirâtre,
N’écrasez donc point ce Sisyphe fragile
Notre pauvre bousier qui s’efforce âprement,
Recyclant pour nous tous la merde universelle
Les matières volées au travail des plus humbles
Que de pseudos Sisyphes et de vrais cacochymes
Sans aucune vergogne remontent vers les cimes.
Le préféré des dieux est t’il vraiment Sisyphe
N’est t’il pas l’humble divin collé optère
Qui pour guider ses pas la nuit suit la voie lactée
Et pour ses humbles taches des étoiles éclairé
Quand la lune trop faible ne guide son chemin.
Ce répugnant insecte à l’allure si humble
Ne figure t’il pas l’absolue modestie
De celui qui dans l’ombre commet le travail
Absolu, sombre, exploité, ignoré de tous
Et de toutes les haines lieu géométrique
Ouvrier clandestin des rejets intestins,
Inévitable objet de l’universelle indifférence…
Au lieu de se répandre en travaux inutiles,
Ne vaut t’il pas mieux comme fait le bousier
Avancer vers l’arrière en poussant les boulettes
Du très haut vers le bas et, les voyant rouler
Regarder en riant débouler dans la pente
L’infâme reliquat de nos impures fientes ….
J. C.